Une question ?

Présidence d'honneur Stéphane Martin

Chaque année, le Parcours des mondes met à l'honneur une personnalité du monde de l'art tribal qui œuvre pour la diffusion des arts d'Afrique, d'Océanie, des Amériques et d'Asie.

 Qui est Stéphane Martin ?

Nous sommes honorés de vous dévoiler le nouveau Président d'Honneur de Parcours des mondes, édition 2023.

Magistrat à la cour des Comptes, Stéphane Martin a travaillé quatre ans au Sénégal et occupé diverses fonctions au Ministère de la Culture avant de présider le musée du quai Branly - Jacques Chirac de décembre 1998 à janvier 2020.

"Depuis sa création par Rick Gadella puis sa «  réinvention » par le regretté Pierre Moos, je n’ai manqué qu’une seule édition du Parcours des Mondes, celle de 2020, je venais tout juste de partir passer deux ans aux Japon.

Quelques vingt débuts de septembre, donc, à déambuler dans le carré magique du «  Quartier » où se croisent dans une intense chasse au trésor collectionneurs de toutes les magnitudes, conservateurs et simples curieux. Littéralement passer d’une porte à l’autre en saluant un visage ami tout en lorgnant déjà sur le contenu de la galerie et guigner l'œuvre désirable : aucune foire, aucun salon, aussi prestigieux et élégamment mis en scène soit-il ne donne un plaisir aussi fort que les quelques jours du Parcours des Mondes.


Ces dernières années, j'ai essayé de regarder les œuvres rassemblées à Paris par les meilleurs marchands du monde avec les exigences et les contraintes d’un responsable de musée qui ne sont pas tout à fait semblables à celles d’un conservateur ni à celles d’un collectionneur. Le Parcours est attaché à quelques unes des grandes acquisitions du musée du quai Branly et, en même temps, à beaucoup d'émotions que j'ai éprouvées comme collectionneur et amateur.

Pour toutes ces raisons je suis fier et touché d’être le Président d'honneur de cette vingt deuxième édition, et j'attends avec impatience les émotions, forcément inédites, qu’elle m’apportera."

Photo : Jiro Yonezawa

 

Entretien avec Stéphane Martin

Qu’est-ce qui vous a donné envie d’être le président d’honneur du Parcours des Mondes  ?

 

Je suis lié au Parcours des Mondes depuis longtemps, car je suis un ami de longue date de Rick Gadella, l’homme qui l’a imaginé il y a de nombreuses années. À l’époque, j’étais responsable d’un projet culturel à Monaco et il gérait Paris Photo. Il m’a parlé de cette idée qui m’a immédiatement séduite en tant que collectionneur d’art tribal. Par la suite, lorsque Pierre Moos a repris le Parcours des Mondes nous sommes également devenu amis. Je suis par ailleurs attaché au quartier de Saint-Germain-des-Prés que j’ai arpenté souvent pendant plus de 40 ans. Le Parcours des Mondes est un événement qui m’est familier et auquel je participe régulièrement depuis sa création si bien que lorsque l’on m’a proposé d’en être le président d’honneur, j’en ai été très heureux et je n’ai pas hésité une seconde.

 

Pour vous, qu’est-ce qui fait le sel du Parcours des Mondes  ?

 

Paris est une place forte du marché de l’art sur un plan international, notamment pour les arts d’Afrique, d’Asie, d’Océanie et des Amériques. Une grande partie des galeries sont aujourd’hui installées à Paris ou à Bruxelles, et dans une moindre mesure à San Francisco pour certaines spécialités. Je suis assez vieux pour avoir connu l’époque où certains grands marchands parisiens avaient ouvert des espaces à New York, espaces qu’ils ont tous refermés assez vite, car les collectionneurs du monde entier ont toujours eu cette envie de venir à Paris. L’idée géniale du Parcours des Mondes est d’utiliser les autres galeries de ce quartier pour accueillir des marchands étrangers le temps du salon. En quelques années, le Parcours est devenu un lieu de rencontre incontournable. Contrairement aux autres foires, il se déroule à ciel ouvert, en pleine rue, sur plusieurs jours. Les gens passent et repassent toute la semaine. C’est un moment convivial, chaleureux, moins encadré que dans un lieu fermé. En bref, il est sans équivalent dans l’univers des arts non européens.

 

Est-ce lié à l’esprit qui règne dans les galeries parisiennes  ?

 

Je trouve les galeries parisiennes particulièrement ouvertes et accueillantes. Je me souviens que lorsque j’étais à Sciences Po, j’aimais déambuler dans le quartier et faire le tour des galeries, en particulier celle de Philippe Ratton qui était à deux pas de l’école. Je n’avais pas les moyens d’acheter chez lui, mais il ne m’a jamais fait sentir que je n’étais pas à ma place. Je pense surtout qu’il était content qu’un jeune s’intéresse à tous ces objets. C’est cette atmosphère qui règne dans les galeries parisiennes que le Parcours des Mondes arrive à reproduire avec les visiteurs, les curieux, les amateurs. Ils sont parfaitement accueillis et traités aussi gentiment que les grands collectionneurs. C’est aussi l’une des clés du succès du Parcours des Mondes, à mon sens.

 

 

Qu’est-ce qui vous a attiré vers l’Afrique  ?

 

Je m’intéresse à l’art africain depuis tout jeune. Un ami de mon père était forestier au Gabon, si bien qu’à partir de l’adolescence, j’ai passé une partie de mes vacances d’été en Afrique avec mon père, au Gabon, au Congo-Brazzaville, en Angola, etc. L’année de mon Bac, nous sommes partis de Paris en Land Rover jusqu’à Abidjan, ce qui serait sans doute plus compliqué aujourd’hui. Je suis tombé amoureux de l’Afrique à un moment de ma vie où j’avais les yeux écarquillés et une grande curiosité, qui je l’espère ne m’a pas quittée.

 

Comment avez-vous commencé à collectionner  ?

 

L’ami de mon père traçait des routes dans les forêts gabonaises et s’aventurait dans des endroits peu ouverts. Il rapportait parfois des petits objets utilitaires et m’a fait quelques cadeaux. À côté de moi dans mon bureau, j’ai encore un de ces petits tabourets que j’ai reçu à 14 ans. Quand l’envie de collectionner vous prend, elle ne vous quitte plus. Je me suis mis à chiner aux puces, à visiter les galeries… J’ai collectionné toute ma vie et, d’une certaine manière, c’est ce qui a conditionné ma carrière professionnelle.

 

C’est-à-dire  ?

 

Après Sciences Po, j’étais tellement absorbé par ma découverte de l’Afrique que je rêvais d’y travailler. J’ai fait l’ENA dans cette perspective, et puis les choses se sont présentées différemment. Je suis rentré à la Cour des comptes et par chance peu après on m’a proposé un poste au Sénégal où je suis resté quatre ans. J’ai continué de collectionner quelques objets. Entre-temps, j’avais fait en 1979 mon service militaire en Polynésie où j’ai découvert l’art océanien.

 

Comment en êtes-vous arrivé à travailler pour des institutions culturelles  ?

 

À mon retour du Sénégal, je souhaitais poursuivre ma carrière en détachement en Afrique ou en travaillant par exemple pour la Banque Mondiale, mais aucun poste ne s’ouvrait. Un ami de la Cour des comptes, connaissant mon attrait pour le secteur culturel, m’a informé que le Centre Pompidou cherchait son délégué général. C’est ainsi que j’ai commencé ma carrière dans la culture. Par la suite, j’ai été directeur de la Musique – un autre sujet qui me passionne – puis directeur de cabinet du ministre de la Culture, Philippe Douste-Blazy nommé par Jacques Chirac. À cette époque, Jacques Kerchache, que je connaissais déjà, portait l’idée de créer un département des arts premiers au Louvre. Surpris de me retrouver au ministère et connaissant mon goût pour les arts extra européens, il m’a présenté au Président Chirac. Et c’est ainsi que, par un concours de circonstances et de rencontres, je me suis retrouvé au cœur du projet du futur Musée du quai Branly.

 

Aujourd’hui, mon père à 98 ans. Comme tous les gens très âgés, il aime bien parler du passé. Nous évoquons souvent nos voyages en Afrique et je lui disais encore récemment : « Voici comment un client de ton restaurant a contribué très indirectement à orienter l’essentiel de ma vie professionnelle, et à une grande partie de ma vie culturelle et intellectuelle. »

 

 Avez-vous poursuivi le développement de votre collection  ?

 

Lorsque je suis rentré en France, j’ai acheté modestement quelques objets. J’avais notamment un lien très fort avec Jean-Michel Huguenin, un grand marchand qui est toujours resté très discret et à qui j’ai acheté des pièces. Comme de nombreux collectionneurs, j’ai papillonné. Je m’intéresse aussi aux livres anciens, mais comme ma fortune n’est pas à la hauteur de ce que je mérite comme le disait Sacha Guitry, je n’ai jamais bâti une collection considérable. En réalité, j’ai toujours eu besoin d’avoir des objets autour de moi, mais c’est plutôt un cadre de vie qu’une véritable collection. Je me suis intéressé aux Philippines, aux vanneries, aux bronzes africains, et à beaucoup d’autres choses. En fait j’ai toujours adoré, le contact avec les collectionneurs et les marchands.

 

Comment les pratiques des collectionneurs ont-elles évolué ces dernières années  ?

 

La manière de collectionner l’art primitif a beaucoup changé ces dix ou quinze dernières années. Je me souviens de deux types de collectionneurs qui ont, pour ainsi dire, disparu aujourd’hui. D’une part les petits collectionneurs, qui achetaient de temps en temps des objets entre 500 et 2000 € et dont les collections étaient bien souvent dispersées à Drouot après leur décès. Et d’autre part, les collectionneurs importants, très secrets, qui achetaient peu aux enchères et attachaient une grande importance à l’aspect inédit de l’objet.

 

Le marché lui-même s’est beaucoup transformé…

 

Pendant longtemps, les grandes collections se faisaient dans le secret des galeries. Avant les années 2000, les grandes ventes d’art tribal étaient rares. Elles ont commencé à se développer au moment de l’ouverture du Musée du quai Branly – bien que je ne pense pas qu’il y ait de causalité entre les deux. Le Musée du quai Branly et ses conservateurs ont toujours entretenu des relations cordiales avec les collectionneurs et les marchands. Une sorte de fraternité s’est créée dans ce monde de l’art tribal. On a commencé à voir de plus en plus d’objets sur le marché. Auparavant, les marchands ne les dévoilaient pas autant, un ou deux spécimens dans une vitrine, guère plus. C’est aussi l’un des charmes du Parcours des Mondes qui a permis de rendre visibles beaucoup plus d’objets et de cultures à tous les publics, et pas seulement aux collectionneurs à portefeuille profond.

 

Les collections et la muséographie du musée ont-elles influencé la manière dont les galeristes exposent les œuvres au public  ?

 

Le musée a ouvert avec les collections du Musée de l’Homme et du Musée des Arts Africains et Océaniens. Ces objets étaient déjà bien connus des spécialistes, mais le musée a largement changé la manière de les montrer. Par la suite, les collections se sont enrichies de nombreuses acquisitions. Un désir nouveau est né pour les arts d’Afrique, d’Asie, d’Océanie et des Amériques et le musée a créé une manière différente de les regarder. Peut-être qu’en ce sens, le quai Branly a exercé une influence.

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Eléonore Théry

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Marie Potard - Le Journal des Arts

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Susan Moore - Apollo

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